Trois scénarios de la mobilité européenne en 2035

Trois scénarios de la mobilité européenne en 2035
Photo by Adelin Grigorescu on Unsplash

Comment se projeter dans les mobilités de demain ? Après avoir opéré une évolution stratégique sur son activité de loueur de véhicules, Arval imagine les tendances qui pourraient dessiner les mobilités en Europe en 2035. Des questions d’énergie aux difficultés d’approvisionnement en passant par les promesses du véhicule autonome, trois scénarios pour toucher demain du bout du doigt.

Scénario 1 : Essor rural du véhicule autonome

Une fois n’est pas coutume, l’innovation profite d’abord aux campagnes. En 2035, le véhicule autonome, symbole emblématique de la mobilité du futur, s’est surtout développé sous la forme de navettes collectives en milieu rural.

D’abord testé par quelques entreprises pionnières pour superviser le “commuting” (les déplacements pendulaires entre domicile et travail) de leurs employés, il a ensuite été financé et encouragé par les pouvoirs publics car il permet un meilleur réseau de transports publics sur le territoire. 

Puis le véhicule autonome s’est étendu aux services de ramassage scolaire, de services de livraison ou aux éboueurs. Réservable à l’avance et disponible à la demande, il connecte maintenant des lieux reculés et contribue à une meilleure justice sociale et territoriale. Des publics habituellement dépendants comme les personnes âgées et les personnes à mobilité réduite trouvent des options abordables pour se déplacer. Les jeunes aussi s’en emparent, ils réservent un véhicule autonome pour rentrer de boîte de nuit.

En ville, c’est autre chose. Malgré les grandes avancées techniques en matière de guidage laser, de géolocalisation et d’intelligence artificielle, le véhicule autonome entre plus lentement dans les grands centres urbains. L’environnement y est plus complexe à interpréter pour une machine. 

Dans les centres d’affaires, les nouveaux bâtiments ont adopté une approche de mobilité « by design », dès la conception

Entre les différentes formes architecturales, la morphologie des intersections, les usagers, la signalétique et les publicités… Le bon dosage entre une conduite ultra-prudente et une conduite fluide reste à trouver.

Dans les centres d’affaires tels que La Défense à Paris ou La City de Londres, les nouveaux bâtiments ont adopté une approche de mobilité « by design », dès la conception. 

Des navettes autonomes circulent sur des axes dédiés pour accompagner les collaborateurs de leur lieu de travail vers la station de métro la plus proche. Les campagnes, elles, ont tracé leur voie. À moindres frais, elles sont parvenues à adapter et simplifier les infrastructures routières par des marquages au sol. S’inspirant del’autopartage, des stations dédiées ont été placées aux endroits stratégiques. Grâce au développement des communications « vehicle-to-everything » qui connectent la voiture à son environnement (infrastructures, piétons, autres véhicules…), la circulation générale est fluidifiée et la cohabitation avec les véhicules non-autonomes se fait sans encombre.

Scénario 2 : La transition énergétique

En 2035, les véhicules thermiques sont en net recul dans la plupart des pays européens, comme l’espéraient les législations de neutralité carbone pour 2050. En tête de classement, la Norvège, les Pays-Bas et le Royaume-Uni bénéficient de politiques publiques ambitieuses et de taxation favorable quand, tout en bas, la Turquie et l’Irlande ont encore des efforts à fournir.

Les gros chantiers étaient différents d’un pays à l’autre : l’Allemagne qui a très tôt investi dans le réseau de bornes de recharge a rapidement réussi à convaincre les conducteurs de passer à l’électrique. La mise en place des zones à faibles émissions carbone dans les métropoles a également été un moteur de la conversion du parc automobile.

Toute l’électricité n’est pas encore verte. La France, par exemple, a pu bénéficier de son parc nucléaire pour produire de l’électricité décarbonée, quand d’autres ont dû massivement investir dans le renouvelable. 

Sur ce point, la démocratisation de petites unités de production d’électricité permet aux territoires de choisir localement leur stratégie, en fonction de leurs atouts géographiques (ensoleillement, vent, courants marins…).

La démocratisation du « retrofit » a été un levier particulièrement décisif

Les pays les plus dépendants aux sources d’énergies intermittentes ont dû également booster le développement du vehicule-to-grid, pour optimiser la redistribution de cette électricité propre. La démocratisation du « retrofit » a été un levier particulièrement décisif. 

Cette approche d’économie circulaire consiste à installer un moteur électrique dans une carrosserie thermique. L’opération réduit le coût pour les ménages et surtout le bilan carbone de la transition vers l’électrique.

Au cours de la décennie 2020, un nombre croissant de jeunes entreprises ont obtenu leurs homologations retrofit : les ateliers se sont ainsi multipliés et les prix ont nettement baissé. Mais surtout, les progrès en termes de batterie ont été le nerf de la guerre. 

Plusieurs fronts se font en parallèle : réduire le poids des batteries tout en prolongeant l’autonomie, réduire le nombre de matériaux rares entrant dans la composition, et surtout, les recycler.

De plus en plus de batteries sont valorisées et trouvent une seconde vie. De son côté, la pile à combustible se popularise et encourage l’usage d’hydrogène comme vecteur d’énergie.

Scénario 3 : L’industrie se met au système D

La crise du Covid-19 avait révélé les premiers dysfonctionnements, la crise climatique s’est chargée du reste.

 Entre 2020 et 2035, les difficultés d’approvisionnement augmentent sensiblement. Les chaînes de production et logistiques deviennent de plus en plus irrégulières, faute de matériaux, de composants ou d’énergies.

Pour contourner ces difficultés et anticiper les manques, les constructeurs automobiles simplifient alors leurs produits : une forme de design de la frugalité se développe. Les véhicules légers et bon marché se multiplient. Ils sont peu technologiques et leurs pièces  sont facilement interchangeables. De manière informelle, le réemploi et le recyclage deviennent la norme. 

La baisse du poids de ces véhicules entraîne mécaniquement une baisse des besoins en énergie

Des véhicules légers et polyvalents se développent, ils prennent des formes multiples qui flirtent parfois avec les mobilités douces ou les micromobilités. Les rues se remplissent de tuk-tuk, de vélo-cargo, de side-cars et de microcitadines. Ces nouveaux véhicules sont adaptés à leurs usages. Selon leurs besoins, les familles en possèdent plusieurs et ils sont utilisés « en commun » par des groupes d’amis ou de voisins.

La baisse du poids de ces véhicules entraîne mécaniquement une baisse des besoins en énergie. Les véhicules s’équipent de motorisations hybrides innovantes grâce aux panneaux solaires ou en utilisant des biocarburants. Les voies navigables comme les fleuves et les canaux sont de plus en plus utilisées pour les déplacements du quotidien et pour le transport de fret.

La logistique urbaine et les problématiques de livraison du dernier kilomètre progressent vite à mesure que se développe un réseau d’ateliers-recycleries et de petits entrepôts. C’est le retour de la petite industrie en ville et de l’économie circulaire. En effet, d’énormes progrès en réemploi et en recyclage des matériaux rares ont permis de mieux valoriser les déchets au niveau local.

Ainsi, loin d’être entravées, les nouvelles mobilités s’avèrent riches et créatives.

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